les-maitres-de-la-raison

Le bi-mensuel Références du Point est devenu une belle institution à la fois pour le grand public que les profs et les élèves de philo. La dernière mouture septembre-octobre pose quelques jalons sur Leibniz, Decartes et Locke.

Mon métier de chirurgien plasticien ne m’a pas éloigné d’un goût pour la philosophie pris à l’adolescence, au cours de mes années de lycée.

Ce n’est évidemment pas un hasard de remettre la raison à l’honneur en ces temps plutôt incertains. Et qui de mieux donc que ces maitres de la raison pour nous en parler. En plus de quelques grandes plumes comme celle de J.L Marion, les textes proposés sont une belle source et une belle ressource pour qui s’intéresse au sujet ou ne connait pas bien.

Descartes ne renie pas le corps mais le pense à sa manière

Parmi ces textes, on lira avec intérêt ce passage de L’homme de Descartes sur le Corps avec une majuscule comme l’écrit le penseur des Méditations et du Cogito.
Un texte qui fait comprendre que la tradition du cartésianisme froid que l’on prête aux français en raison de l’influence de Descartes ne repose pas sur des notions exclusives.
Inutile de voir des hexagonaux débarquer faire leur intervention de chirurgie esthétique en Tunisie pour se douter que la France Cartésienne n’est pas que le royaume de l’intelligible opposé à celui des sensations et de la matière.
Il y a un corps en grande lettrine pour Descartes et c’est piquant de le constater maintenant puisque cela laisse à penser que le philosophe non seulement y prête une attention soutenue mais qu’en plus il lui donne une grande importance dans sa spécificité. Cela revient à dire que contrairement à la thèse admise, ce n’est pas juste un penseur de la spiritualité versus Nietzsche ou Spinoza mais bien à sa manière un curieux qui n’est pas effarouché par la matière et je dirais plus par les nerfs, les vaisseaux et les liquides.

Le texte est admirable parce qu’il y a la description d’un génie du corps. Un génie mécanique, c’est-à-dire qui trouve en lui-même son propre schéma d’organisation et de fonctionnement. Comme la montre de précision, le corps une fois constitué dans toutes ses parties et j’allais dire ses engrenages n’a besoin de rien d’autre que lui-même pour se perpétuer.

Outre cette première description d’un corps machine qui n’a pas besoin d’une sorte d’âme aristotelicienne diffuse et mouvante pour agir, cet extrait permet de voir le chemin parcouru entre ce que le post humanisme en dit et ce que nous en disons aujourd’hui ou plutôt ce que nous en faisons.

Celui qui n’aime que la somme de parties jointes et étendues avec des fonctionnalités insignes et devenu à notre époque un objet d’adoration et même de manipulation. On retrouve un Corps en majuscule mais non pas du fait de son inventivité native mais du fait de sa mise au premier plan. C’est le corps facade, le corps parlant qui remplace l’identité ou qui la représente dans sa totalité au point que le transformer médicalement est devenu tout à fait banal et finalement pas si cher que ça.

Vous lirez donc que ce texte riche comme vous lirez aussi les classiques cartésiens. Et je vous invite aussi car on les connait moins à bucher sur la conceptualité Leibnizienne ( au-delà des préjugés sur son  soit disant optimisme croqué par Voltaire dans Candide) et à comprendre les fondements de la démocratie et de l’utilitarisme anglo-saxon dans les pensées de John Locke.

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